Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/164

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terrible. Le sentiment qu’il inspire le plus autour de lui, c’est la crainte ; les gens, effrayés de ses prodiges, viennent le supplier de s’éloigner de leurs frontières.

Il ne faut pas conclure de là que l’Évangile de Marc soit moins historique que les autres ; tout au contraire. Des choses qui nous blessent au plus haut degré furent de premier ordre pour Jésus et ses disciples immédiats. Le monde romain était encore plus que le monde juif dupe de ces illusions. Les miracles de Vespasien sont conçus exactement sur le même type que ceux de Jésus dans l’Évangile de Marc. Un aveugle, un boiteux, l’arrêtent sur la place publique, le supplient de les guérir. Il guérit le premier en crachant sur ses yeux, le second en marchant sur sa jambe[1]. Pierre semble avoir été principalement frappé de ces prodiges, et il est permis de croire qu’il insistait beaucoup là-dessus dans sa prédication. De là, dans l’œuvre qu’il a inspirée, une physionomie tout à fait à part. L’Évangile de Marc est moins une légende qu’une biographie écrite avec crédulité. Les caractères de la légende, le vague des circonstances, la mollesse des contours frappent dans Matthieu et

  1. Tac., Hist., IV, 81-82 ; Suétone, Vesp., 7.