Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/393

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Toutes les familles d’Israël jouirent ainsi, après un cruel orage, d’un calme relatif. On respira. Durant quelques années, l’Église de Rome fut plus heureuse et plus florissante qu’elle n’avait jamais été[1]. Les idées apocalyptiques reprirent leur cours ; on croyait que Dieu avait fixé le temps de sa venue en terre pour le moment où le nombre des élus atteindrait un certain chiffre ; chaque jour on voyait avec consolation croître ce nombre[2]. La croyance au retour de Néron n’avait pas disparu. Néron, s’il avait vécu, aurait eu soixante ans, ce qui était beaucoup pour le rôle qu’on lui prêtait, mais l’imagination raisonne peu ; d’ailleurs, Néron l’Antechrist devenait de jour en jour un personnage idéal, placé en dehors des conditions de la vie naturelle. On continua longtemps à parler de son retour, lorsqu’il était déjà clair qu’il ne pouvait plus vivre[3].

Quant aux Juifs, ils étaient plus ardents et plus sombres que jamais. Il semble que ce fut une loi de la conscience religieuse de ce peuple d’émettre, à chacune des grandes crises qui déchiraient l’empire romain, une de ces compositions allégoriques où il

  1. Lactance, De mort. persec., 3.
  2. Clém. Rom., Epist., ch. 2, 58, 59 (édit. Philothée). Cf. Apoc., vi, 11 ; IV Esdr., iv, 36.
  3. Voir l’Antechrist, p. 317, 318, note 3. Comp. Carm. sib., II, 167 ; III, 73.