Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/456

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au nez… N’espère pas qu’il y ait jamais une république de Platon ; contente-toi des petites améliorations, et, si tu y réussis, ne crois pas que ce soit peu de chose. Qui peut en effet changer les dispositions intérieures des hommes ? Et sans le changement des cœurs et des opinions, que sert le reste ? Tu n’aboutirais qu’à faire des esclaves et des hypocrites… L’œuvre de la philosophie est chose simple et modeste ; loin de nous ce galimatias prétentieux. » Ah ! l’honnête homme !

En résumé, malgré tous ses défauts, cette société du iie siècle était en progrès. Il y avait décadence intellectuelle, mais amélioration morale, comme cela semble avoir lieu de nos jours dans les classes supérieures de la société française. Les idées de charité, d’assistance des pauvres, le dégoût des spectacles[1] se développaient de toutes parts[2]. Tant que cet excellent esprit présida aux destinées de l’empire, c’est-à-dire jusqu’à la mort de Marc-Aurèle, le christianisme sembla enrayé. Il s’élança au contraire d’un mouvement irrésistible quand, au iiie siècle, les belles maximes des Antonins furent oubliées. Nous l’avons dit : Nerva, Trajan, Adrien, Antonin, Marc-

  1. Épictète, Manuel, xxxiii, 10 ; Marc-Aurèle, Pensées, VII, 3.
  2. Pline, Epist., X, 94. Cf. Mommsen, Inscr. regni Neap., 4546 ; Orelli, 114, 6042, 6669. Voir les Apôtres, p. 320.