Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/489

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la première, et la pêche du royaume de Dieu est surabondante.

Il se passa quelque chose d’analogue à ce qui eut lieu, vers l’époque de la Restauration, dans le parti qui se prit à relever le culte de la révolution française. Entre les héros de la Révolution, les luttes avaient été ardentes, acharnées ; on s’était haï jusqu’à la mort. Mais, vingt-cinq ans après, il ne restait de tout cela qu’un grand résultat neutre. On oublia que les girondins, Danton, Robespierre, s’étaient tranché la tête les uns aux autres. À part quelques rares exceptions, il n’y eut plus de partisans des girondins, de Danton, de Robespierre ; il y eut les partisans de ce que l’on considéra comme leur œuvre commune, c’est-à-dire de la Révolution. On plaça au même Panthéon, comme frères, des gens qui s’étaient proscrits entre eux. Dans les grands mouvements historiques, il y a le moment d’exaltation où des hommes associés en vue d’une œuvre commune se séparent ou se tuent pour une nuance, puis le moment de réconciliation, où l’on cherche à prouver que ces ennemis apparents s’entendaient et qu’ils ont travaillé pour une même fin. Au bout de quelque temps, de toutes ces discordances sort une doctrine unique, et un accord parfait règne entre les disciples de gens qui se sont anathématisés.