Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/537

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tive, mes pires ennemis. Laissez-moi être la pâture des bêtes, grâce auxquelles il me sera donné de jouir de Dieu. Je suis le froment de Dieu ; il faut que je sois moulu par les dents des bêtes, pour que je sois trouvé pur pain de Christ. Caressez-les plutôt, afin qu’elles soient mon tombeau et qu’elles ne laissent rien subsister de mon corps, et que mes funérailles ne soient ainsi à charge à personne. Alors je serai vraiment disciple de Christ, quand le monde ne verra plus mon corps…

Depuis la Syrie jusqu’à Rome, sur terre, sur mer, de jour, de nuit, je combats déjà contre les bêtes, enchaîné que je suis à dix léopards (je veux parler des soldats mes gardiens, qui se montrent d’autant plus méchants qu’on leur fait plus de bien)[1]. Grâce à leurs mauvais traitements, je me forme ; « mais je ne suis pas pour cela justifié[2] ». Je gagnerai, je vous l’assure, à me trouver en face des bêtes qui me sont préparées. J’espère les rencontrer dans de bonnes dispositions ; au besoin je les flatterai de la main, pour qu’elles me dévorent sur-le-champ, et qu’elles ne fassent pas comme pour certains, qu’elles ont craint de toucher. Que si elles y mettent du mauvais vouloir, je les forcerai.

    pas de sens ; on conçoit la chute de σιω, non son insertion ; ἀλλά suppose μόνον. Quant au second membre de phrase, qui a disparu dans la collection de sept lettres et s’est conservé dans celle de treize, il appartenait sûrement au texte primitif (voir Dressel, Patres apost., p. 167, note 7).

  1. Sans doute les soldats, pour se faire payer par les fidèles, redoublaient de dureté envers le confesseur (voir Lucien, Peregrinus, l. c.).
  2. I Cor., iv, 4.