Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 6 Eglise chretienne, Levy, 1879.djvu/324

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parricide[1], et elle ameutait à la fois toutes les superstitions. L’aversion non dissimulée des chrétiens pour les temples, les statues, les autels, amenait sans cesse des incidents[2]. Il n’y avait pas un fléau, pas un tremblement de terre, dont on ne les rendît responsables[3]. Tous les sacrilèges, les incendies de temples, leur étaient attribués[4]. Les chrétiens et les épicuriens étaient à cet égard confondus, et leur présence secrète dans une ville était un épouvantail, qu’on agitait pour soulever la foule[5]. Le bas peuple était ainsi le foyer de la haine contre les chrétiens. Ce que les actes authentiques des martyrs traitent avec le plus de mépris et comme le pire ennemi des saints, c’est la canaille des grandes cités. Les fidèles ne s’envisagent jamais comme des gens du peuple ; ils semblent former dans les villes une petite bourgeoisie honnête[6], très-respectueuse pour l’autorité, très-disposée à s’entendre avec elle. Se défendre devant le peuple paraît aux évêques une honte ;

    saint Polycarpe, ci-après, p. 457 ; faux rescrit de Marc-Aurèle, à la suite de saint Justin.

  1. Lucien, Peregr., 21.
  2. Orig., Contre Celse, VII, 62 ; VIII, 17 et suiv.
  3. Eusèbe, IV, 13. Cf. Homél. pseudo-clém., vii, 9 et suiv.
  4. Ælius Aristide, Eleusinius, I, p. 423, Dindorf.
  5. Lucien, Alexander, 25.
  6. Actes de Polycarpe et des martyrs de Lyon. Cf. Eusèbe, H. E., III, 33 ; IV, 9.