Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 6 Eglise chretienne, Levy, 1879.djvu/402

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et peut-être identique à l’Évangile des ébionites. Les fables, en tout cas, y abondaient[1] ; on était à deux pas des puérilités qui remplissent les Évangiles apocryphes. Mais un certain sens droit fait éviter à Justin les erreurs extrêmes. Son érudition païenne, toute frelatée qu’elle était, frappait les gens peu instruits En somme, c’était un précieux avocat. Tous les apologistes qui suivirent s’inspirèrent de lui[2].

Son admiration pour la philosophie grecque ne pouvait être du goût de tout le monde ; mais elle paraissait d’une bonne tactique. On n’était pas encore au temps des injures envers les sages de l’antiquité ; on prenait le bien où on le trouvait ; on voyait dans Socrate un précurseur de Jésus, et dans l’idéalisme platonicien une sorte de préchristianisme[3]. Justin est autant un disciple de Platon et de Philon que de Moïse et du Christ[4] ; Moïse étant plus ancien que les sages grecs, ceux-ci lui ont emprunté leurs

    161 ; Tischendorf, Evangel. apocr., p. xiii, xxxviii, xxxix. Notez surtout la flamme du Jourdain, trait caractéristique de l’Évangile des Hébreux (Épiph., xxx, 13).

  1. Ainsi la caverne de Bethléhem, le feu du Jourdain, les charrues de Jésus. Dial., 78, 88. Voir ci-dessus, p. 344 et suiv.
  2. Tatien, Athénagore, Irénée, Minucius Félix, Tertullien, peut-être Méliton. Voir les index d’Otto, p. 595-596.
  3. Apol. I, 46.
  4. Apol. I, 59, 60.