Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 6 Eglise chretienne, Levy, 1879.djvu/418

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le projet de frapper un grand coup, propre à réveiller les saints. Il feignit une révélation qu’aurait eue, cinquante ou soixante ans auparavant, du temps de la persécution de Domitien, un certain Hermas, ancien de l’Église de Rome[1]. Clément, le garant de toutes les fraudes pieuses de l’ébionisme romain, couvrait le livre de son autorité, et était censé l’avoir adressé aux Églises du monde entier[2].

Hermas, enfant trouvé ou né dans l’esclavage, avait été vendu, par le propriétaire d’esclaves qui l’avait

  1. Vis. ii, 2, 4 ; Sim. x, 4. Voyez cependant Vis. iii, 1. C’est arbitrairement qu’Origène (In Rom., x, 31) et, après lui, Eusèbe (H. E., III, iii, 6) et saint Jérôme (De viris ill., 10) ont identifié notre Hermas avec l’Hermas de Rom., xvi, 14. Ce dernier était un Éphésien, non un Romain (voyez Saint Paul, p. lxv et suiv.). On pouvait l’ignorer vers l’an 150, époque où l’édition de saint Paul était déjà fixée comme nous l’avons ; mais cet Hermas n’avait rien qui le désignât pour le choix de notre pieux romancier. La qualification discipulus B. Pauli apostoli, que porte Hermas dans les manuscrits latins, vient de l’identification adoptée par Origène, Eusèbe et saint Jérôme.
  2. Le Pasteur n’était connu autrefois que par une version latine, que des retouches successives avaient rendue très-infidèle. De nos jours, Dressel a trouvé au Vatican une version latine beaucoup moins altérée ; une traduction éthiopienne a été publiée par M. d’Abbadie (Leipzig, 1860) ; enfin la presque totalité du texte grec a été découverte, d’abord dans les manuscrits sophistiqués de Simonidès, puis dans le Codex Sinaïticus. On peut se servir de l’édition de M. Hilgenfeld (Leipzig, 1866) ou de MM. de Gebhardt et Harnack (Leipzig, 1877).