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parlions tout à l’heure, et, de l’autre, certaines spéculations du platonisme[1]. Le livre alexandrin de la Sagesse, attribué à Salomon[2], se complaît déjà dans ces théories. Le Logos y apparaît comme le métatrône, l’assesseur de la Divinité[3]. On prit l’habitude de rapporter au Logos tout ce que l’ancienne philosophie hébraïque disait de la Sagesse divine[4]. Le « Souffle de Dieu » (rouah), déjà présenté au début de la Genèse comme fécond, devint une sorte de démiurge à côté du dabar[5].

Philon[6] combina ces habitudes de langage avec ses notions de philosophie grecque. Le Logos de Philon, c’est le divin dans l’univers, c’est Dieu extério-

  1. Surtout dans le Timée.
  2. Sap. Salom., xviii, 15 et suiv. Le verset i, 5, de la traduction latine de la Sagesse de Jésus fils de Sirach est une interpolation.
  3. Sap. Salom., ix, 4 : τὴν τῶν σῶν θρόνων πάρεδρον σοφίαν. Il faut tenir compte ici des nuances de la particule be, signifiant à la fois dans, avec, par, si bien qu’une phrase comme « Dieu a créé le monde bidbaro ou be-mémeré ou be-hokmato ou be-rouah piou » implique une équivoque dont les personnes qui savent les langues sémitiques peuvent seules se rendre compte (voir, par exemple, Ps. xxxiii, 6). Traduites en grec, de telles phrases devaient produire toute une métaphysique de malentendus.
  4. Comp. Philon, Fragm., Opp., II, p. 655, Mangey, à Sap Salom., vii, 24 ; viii, 1.
  5. Ps. xxxiii, 6, présentant déjà une sorte de Trinité.
  6. V. l’Antechrist, p. 82, note 1.