Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/176

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encore maintenant Bir-Iakoub. Les disciples entrèrent dans la vallée et allèrent à la ville acheter des provisions ; Jésus s’assit sur le bord du puits, ayant en face de lui le Garizim.

Il était environ midi. Une femme de Sichem vint puiser de l’eau. Jésus lui demanda à boire, ce qui excita chez cette femme un grand étonnement, les Juifs s’interdisant d’ordinaire tout commerce avec les Samaritains. Gagnée par l’entretien de Jésus, la femme reconnut en lui un prophète, et, s’attendant à des reproches sur son culte, elle prit les devants. « Seigneur, dit-elle, nos pères ont adoré sur cette montagne, tandis que, vous autres, vous dites que c’est à Jérusalem qu’il faut adorer. — Femme, crois-moi, lui répondit Jésus, l’heure est venue où l’on n’adorera plus ni sur cette montagne ni à Jérusalem, mais où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité. »

Le jour où il prononça cette parole, il fut vraiment fils de Dieu. Il dit pour la première fois le mot sur lequel reposera l’édifice de la religion éternelle. Il fonda le culte pur, sans date, sans patrie, celui que pratiqueront toutes les âmes élevées jusqu’à la fin des temps. Non-seulement sa religion, ce jour-là, fut la bonne religion de l’humanité, ce fut la religion absolue ; et, si d’autres planètes ont des habitants doués de raison et de moralité, leur religion ne peut être différente de celle que Jésus a proclamée près du puits de Jacob. L’homme