Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/186

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épreuves ; il est soumis à Dieu, comme un fils. Lui qui doit juger le monde, il ne connaît pas le jour du jugement. Il prend des précautions pour sa sûreté. Peu après sa naissance, on est obligé de le faire disparaître pour éviter des hommes puissants qui voulaient le tuer. Tout cela est simplement le fait d’un envoyé de Dieu, d’un homme protégé et favorisé de Dieu. Il ne faut demander ici ni logique ni conséquence. Le besoin que Jésus avait de se donner du crédit et l’enthousiasme de ses disciples entassaient les notions contradictoires. Pour les hommes surtout préoccupés de la venue du Messie, pour les lecteurs acharnés des livres de Daniel et d’Hénoch, il était le fils de l’homme ; pour les Juifs de la croyance commune, pour les lecteurs d’Isaïe et de Michée, il était le fils de David ; pour les affiliés, il était le fils de Dieu, ou simplement le Fils. D’autres, sans que les disciples les en blâmassent, le prenaient pour Jean-Baptiste ressuscité, pour Élie, pour Jérémie, conformément à la croyance populaire que les anciens prophètes allaient se réveiller pour préparer les temps du Messie.

Les miracles passaient, à cette époque, pour la marque indispensable du divin et pour le signe des vocations prophétiques. Les légendes d’Élie et d’Élisée en étaient pleines. Il était reçu que le Messie en ferait beaucoup. Il faut se rappeler que toute l’antiquité, à l’exception des grandes écoles scientifiques de la Grèce et de leurs