Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/187

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adeptes romains, admettait le miracle ; que Jésus, non-seulement y croyait, mais n’avait pas la moindre idée d’un ordre naturel réglé par des lois. Ses connaissances sur ce point n’étaient nullement supérieures à celles de ses contemporains. Bien plus, une de ses opinions le plus profondément enracinées était qu’avec la foi et la prière l’homme a tout pouvoir sur la nature. La faculté de faire des miracles passait pour une licence régulièrement départie par Dieu aux hommes, et n’avait rien qui surprît.

Sans doute la renommée populaire, avant et après la mort de Jésus, exagéra énormément le nombre de faits de ce genre. Presque tous les miracles que Jésus crut exécuter paraissent avoir été des miracles de guérison. La médecine était à cette époque en Judée ce qu’elle est encore aujourd’hui en Orient, c’est-à-dire nullement scientifique, absolument livrée à l’inspiration individuelle. La médecine scientifique, fondée depuis cinq siècles par la Grèce, était, à l’époque de Jésus, inconnue des Juifs de Palestine. Dans un tel état de connaissances, la présence d’un homme supérieur, traitant le malade avec douceur, et lui donnant par quelques signes sensibles l’assurance de son rétablissement, est souvent un remède décisif. Qui oserait dire que, dans beaucoup de cas, et en dehors des lésions tout à fait caractérisées, le contact d’une personne exquise ne vaut pas les ressources de la pharmarie ?