Page:Renan - L’Avenir de la science, pensées de 1848.djvu/19

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turaliste pour suivre les voies de la vie dans le labyrinthe que nous voyons sans le voir, j’étais évolutionniste décidé en tout ce qui concerne les produits de l’humanité, langues, écritures, littératures, législations, formes sociales. J’entrevoyais que le damier morphologique des espèces végétales et animales est bien l’indice d’une genèse, que tout est né selon un dessin dont nous voyons l’obscur canevas. L’objet de la connaissance est un immense développement dont les sciences cosmologiques nous donnent les premiers anneaux perceptibles, dont l’histoire proprement dite nous montre les derniers aboutissants. Comme Hegel, j’avais le tort d’attribuer trop affirmativement à l’humanité un rôle central dans l’univers. Il se peut que tout le développement humain n’ait pas plus de conséquence que la mousse ou le lichen dont s’entoure toute surface humectée. Pour nous, cependant, l’histoire de l’homme garde sa primauté, puisque l’humanité seule, autant que nous savons, crée la conscience de l’univers. La plante ne vaut que comme produisant des fleurs, des fruits, des tubercules nutritifs, un arôme, qui ne sont rien comme masses, si on les compare à la masse de la plante, mais qui offrent, bien plus que les feuilles, les branches, le tronc, le caractère de la finalité.