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Page:Renan - Le Judaisme comme race et comme religion, 1883.djvu/14

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Je voudrais échanger quelques idées avec vous sur la distinction que, selon moi, il importe de faire entre la question religieuse et la question ethnographique en ce qui concerne le judaïsme. Que le judaïsme soit une religion et une grande religion, cela est clair comme le jour. Mais on va d’ordinaire plus loin. On considère le judaïsme comme un fait de race, on dit : « la race juive » ; on suppose, en un mot, que le peuple juif, qui, à l’origine, créa cette religion, l’a toujours gardée pour lui seul. On voit bien que le christianisme s’en est détaché à une certaine époque ; mais on se laisse aller volontiers à croire que ce petit peuple créateur est resté toujours identique à lui-même, si bien qu’un juif de religion serait toujours un juif de sang. Jusqu’à quel point cela est-il vrai ? Dans quelle mesure ne convient-il pas de modifier une telle conception ? Nous allons l’examiner. Mais auparavant permettez-moi de poser bien nettement la question au moyen d’une comparaison.

Il y a dans le monde, à Bombay, une petite religion qui est celle des parsis, l’ancienne religion de la Perse. Dans ce cas, la question est bien claire. Le parsisme est une religion qui a été nationale à l’origine et qui est gardée par une race évidemment plus ou moins homogène ; je ne crois pas qu’il y ait jamais eu, en effet, beaucoup de conversions au parsisme. Voilà donc un fait religieux exactement connexe à un fait de race.

Prenons, au contraire, le protestantisme dans les