Page:Renan - Le Judaisme comme race et comme religion, 1883.djvu/17

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naïve dans un récit du second livre des Rois, relatif à la situation où se trouvèrent les Cuthéens qui avaient été amenés par les Assyriens en Samarie. Il leur arrive des mésaventures. Ils sont attaqués par des lions, qu’ils regardent comme des émissaires du dieu du pays, mécontent de ce qu’il n’est pas adoré à sa manière, et ils envoient au gouvernement assyrien une pétition se résumant à peu près en ceci : « Le dieu du pays nous en veut de ce qu’il n’est pas servi comme il voudrait l’être ; envoyez-nous des prêtres qui sachent comment nous pourrions le satisfaire. » Voilà donc une idée tout autre assurément que celle du christianisme et que celle du bouddhisme. Le dieu, en ce cas, est essentiellement local et national.

Toutes les religions nationales ont péri. L’humanité a voulu de plus en plus des religions universelles, expliquant à l’homme ses devoirs généraux et ayant la prétention d’apprendre à l’humanité le secret de ses destinées. Les religions nationales avaient un programme plus limité : c’était le patriotisme, doublé de cette idée que chaque pays a un génie qui veille sur lui et qui demande à être servi d’une certaine manière. Cette théologie étroite a complètement disparu. Elle a disparu devant l’idée chrétienne, l’idée bouddhique et l’idée musulmane. Cela a été un immense progrès. Je ne vois guère, dans l’histoire des nations civilisées, que deux exemples d’anciennes religions nationales qui aient survécu : c’est d’abord le parsisme (et encore il faut dire que, pour ses sectateurs, le parsisme présente, à beaucoup d’égards,