Page:Renan - Le Judaisme comme race et comme religion, 1883.djvu/22

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capitale sera Jérusalem, où tous les peuples viendront rendre hommage à l’Éternel. Il est clair qu’une pareille religion n’est pas nationale. Il y a au fond de tout cela une part d’orgueil national, sans contredit : quelle est l’œuvre historique où un tel fond ne se retrouve pas ? Mais l’idée, vous le voyez, est universelle au premier chef, et, de là à la propagande, à la prédication, il n’y avait qu’un pas. Le monde, à cette époque, ne se prêtait pas à une grande propagande comme fut plus tard l’apostolat chrétien. Les missions de saint Paul, les relations des Églises entre elles n’étaient possibles qu’avec l’empire romain. Mais l’idée d’une religion universelle n’en est pas moins parfaitement née dans le sein du vieil Israël. Elle se manifeste bien plus énergiquement encore dans les écrits de la captivité. Le siècle qui suivit la destruction de Jérusalem fut pour le génie juif une époque de merveilleux épanouissement. Rappelez-vous les beaux chapitres qu’on a mis à la suite du livre d’Isaïe : « Lève-toi, resplendis, Jérusalem ; car la lumière de l’Éternel va se lever sur toi ! » Rappelez-vous encore l’image de Zacharie. « Il arrivera un jour où dix hommes de toutes les langues s’attacheront aux pans de la robe d’un juif et lui diront : « Mène-nous à Jérusalem ; c’est là qu’on fait les vrais sacrifices, les seuls qu’agrée l’Éternel ». La lumière émanera donc du peuple juif, et cette lumière remplira le monde entier. Une telle idée n’a rien d’ethnographique ; elle est universelle au plus haut degré, et le peuple qui la proclame est évidemment appelé à une