Page:Renan - Ma soeur Henriette, Calmann-Levy, 1895.djvu/120

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

on ne doit peut-être pas aimer. » Je fondais en larmes ; je lui parlai du retour ; je la ramenais au petit Ary, sachant que cela l’émouvait doucement. Elle abondait dans ce sens, et s’attachait aux circonstances qui la touchaient le plus. Elle rappela encore le souvenir si cher de notre père. Cet éclair fut le dernier pour nous deux. Nous étions dans l’intervalle de deux accès de fièvre pernicieuse ; l’accès final n’était plus qu’à quelques heures. En dehors des moments où venait le médecin, nous étions seuls, entre les mains de nos domestiques arabes et des gens du village, toutes les autres personnes de la mission étant parties ou occupées ailleurs.

Je n’ai que peu de souvenirs distincts de la journée fatale du dimanche, ou pour mieux dire il a fallu que d’autres aient fait revivre ces traces pour moi d’abord totalement oblitérées. Je continuai d’agir durant tout ce jour,