Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/158

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nisme chrétien. Alexandrie presque tout entière fut convertie par les gnostiques. Clément d’Alexandrie est ce qu’on peut appeler un gnostique tempéré ; il cite avec respect Héracléon comme un docteur faisant autorité à beaucoup d’égards ; il emploie en bonne part le mot de gnostique et le fait synonyme de chrétien[1] ; il est loin, en tout cas, d’avoir contre les idées nouvelles la haine d’Irénée, de Tertullien, de l’auteur des Philosophumena. On peut dire que Clément d’Alexandrie et Origène introduisirent dans la science chrétienne ce que la tentative trop hardie d’Héracléon et de Basilide avait d’acceptable. Mêlée intimement à tout le mouvement intellectuel d’Alexandrie, la gnose eut une influence décisive sur le tour que prit au iiie siècle la philosophie spéculative dans cette ville, devenue alors le centre de l’esprit humain. La conséquence de ces disputes sans fin fut la constitution d’une sorte d’académie chrétienne, d’une véritable école de saintes lettres et d’exégèse[2], qu’illustreront bientôt Pantænus, Clément, Origène. Alexandrie devient chaque jour de plus en plus la capitale de la théologie chrétienne.

L’effet de la gnose sur l’école païenne d’Alexandrie ne fut pas moindre. Ammonius Saccas, né de

  1. Strom., IV, ch. 4, 26, et les livres V et VII entiers.
  2. Eusèbe, H. E., V, x, 1.