Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/209

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furent très estimés de ceux qui les lurent. Apollinaire combattit énergiquement le montanisme et fut peut-être l’évêque qui contribua le plus à sauver l’Église du danger que lui faisaient courir ces prédicants. Les excès des encratites le trouvèrent aussi fort sévère. Un mélange étonnant de bon sens et de littérature, de fanatisme et de modération caractérisait ces hommes extraordinaires, vrais ancêtres de l’évêque lettré, politiques habiles, tout en ayant l’air de n’écouter que l’inspiration du ciel, opposés aux violents, tout en étant eux-mêmes des violents. Grâce aux douceurs menteuses d’un langage libéral, ces Dupanloups anticipés prouvèrent que les calculs mondains les plus raffinés n’excluent pas l’illuminisme le plus bizarre, et qu’avec une parfaite honnêteté, on peut réunir en sa personne toutes les apparences de l’homme raisonnable et tous les entraînements de l’exalté.

Miltiade, comme Apollinaire, grand adversaire des montanistes, fut aussi un écrivain fécond. Il composa deux livres contre les païens, deux livres contre les juifs, sans oublier une Apologie adressée aux autorités romaines[1]. Musanus combattit les encra-

  1. Eusèbe, V, ch. xvii ; Tertullien, In Val., 5 ; saint Jérôme, De viris ill., 39 ; Chron. d’Alex., p. 263 (Du Cange) ; Otto, Corpus apol., t. IX, p. 364 et suiv.