Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/402

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qu’ils disent, il n’y en a pas d’assez impudent pour le dire. Nous avons des esclaves, les uns plus, les autres moins ; nous ne songeons pas à nous cacher d’eux, et néanmoins pas un d’entre eux n’a tenu encore ces propos mensongers contre nous. Nous ne pouvons souffrir la vue d’un homme que l’on fait mourir, même justement. Qui ne se porte avec empressement aux spectacles de gladiateurs et de bêtes, principalement quand c’est vous qui les donnez ? Eh bien, nous avons renoncé à ces spectacles, croyant qu’il n’y a guère de différence entre regarder un meurtre et le commettre[1]. Nous tenons pour homicides les femmes qui se font avorter, et nous croyons que c’est tuer un enfant que de l’exposer[2]

Ce que nous demandons, c’est le droit commun, c’est de n’être pas punis pour le nom que nous portons. Quand un philosophe commet un délit, on le juge pour ce délit, et on n’en rend pas la philosophie responsable. Si nous sommes coupables des crimes dont on nous accuse, n’épargnez ni âge ni sexe, exterminez avec nous nos femmes et nos enfants. Si ce sont des inventions, sans autre fondement que l’opposition naturelle du vice et de la vertu, c’est à vous d’examiner notre vie, notre doctrine, notre soumission dévouée à vous, à votre maison, à l’empire, et de nous faire la même justice que vous feriez à nos adversaires[3].


La déférence extrême, presque l’obséquiosité envers l’empire est le caractère d’Athénagore, comme

  1. Comp. Théophile, Ad Autol., III, 15.
  2. Leg., 32, 33, 34, 35.
  3. Ibid., 2, 3.