Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/660

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ne ramènera pas le peuple des grandes villes aux anciennes églises et le peuple des campagnes n’y va que par habitude ; or, une église ne tient pas sans peuple ; l’église est le lieu du peuple. Le parti catholique, d’un autre côté, a fait, en ces dernières années, tant de fautes, que sa force politique est comme épuisée. Une redoutable crise aura donc lieu dans le sein du catholicisme. Il est probable qu’une partie de ce grand corps persévérera dans son idolâtrie et restera, à côté du mouvement moderne, comme un contre-courant parallèle d’eau stagnante et croupie. Une autre partie vivra et, abandonnant les erreurs surnaturelles, s’unira au protestantisme libéral, à l’israélitisme éclairé, à la philosophie idéaliste, pour marcher vers la conquête de la religion pure, « en esprit et en vérité ».

Ce qui est hors de doute, quel que soit l’avenir religieux de l’humanité, c’est que la place de Jésus y sera immense. Il a été le fondateur du christianisme, et le christianisme reste le lit du grand fleuve religieux de l’humanité. Des affluents venant des points les plus opposés de l’horizon s’y sont mêlés. Dans ce mélange, aucune source ne peut plus dire : « Ceci est mon eau. » Mais n’oublions pas le ruisseau primitif des origines, la source dans la montagne, le cours supérieur, où un fleuve devenu ensuite large comme