Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/155

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but à lui-même : c’est le monimentum dans le sens radical du mot ; le fait de sa construction est par conséquent le côté essentiel qu’il importe de rappeler et de faire ressortir. Construit en dehors de toute vue d’utilité pratique, il n’est là que pour attester la force de celui qui l’a élevé et le nombre de captifs qu’il pouvait faire concourir à l’exécution de sa volonté. En général, ce qui frappe dans les curieuses représentations découvertes et reproduites par M. Layard, c’est la pauvreté des moyens dynamiques, mais aussi la manière ingénieuse et surtout l’ensemble avec lequel ils sont mis en œuvre. Tout se réduit à l’application immédiate de la force brute, c’est-à-dire du bras des captifs ou des malfaiteurs, secondé seulement par l’emploi du levier et du rouleau. Des ingénieurs, munis d’instruments à signaux et de porte-voix, dirigent l’opération ; un surveillant, par huit à dix hommes, procure un redoublement de force en faisant pleuvoir sur les malheureux placés sous ses ordres une grêle de coups. Le roi en personne, sur son char et entouré de sa garde, préside au travail. M. Layard, a rapproché de ces singuliers bas-reliefs une représentation égyptienne qui rend bien sensible l’analogie de la mécanique des deux peuples : les Égyptiens cependant y paraissent supérieurs aux Assyriens. Le colosse est mieux assujetti et mieux protégé dans le trajet ; aux rouleaux est substitué un plancher mobile, sur lequel on répand de l’huile. Enfin, ce qui peut n’être un avantage qu’aux yeux des philanthropes incorrigibles, tout se passe avec une dépense beaucoup moindre de coups de bâton.

Les scènes guerrières sont de toutes les plus nom-