Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/20

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n’est faite ; aucune ne se fera. Faut-il désespérer et ne plus admettre pour notre patrie aucun avenir ? Non, certes. Les choses humaines sont multiples et diverses, riches en volte-face étranges. Un pays fécond en ressources a toujours un grand rôle à jouer. Ce qui a été pendant quelque temps un désavantage devient ensuite un avantage. La période que nous allons traverser peut et doit être une période de liberté à l’américaine ; dans ce nouvel exercice, la France peut montrer des prestesses inattendues. L’essentiel dans la vie est de ne pas vouloir des choses contradictoires. Ce que nous aurons pourra être fort agréable, fort brillant, fort aimable, pourvu que nous ne prétendions pas qu’on peut joindre aux douceurs du laisser aller les avantages du gouvernement fort. La république n’est forte que par la terreur, et la terreur, heureusement, est à mille lieues de nous. Un gouvernement vraiment fort est celui qui, sans entreprendre la tâche absurde de contrarier la nation, conduit la nation, est accepté d’elle comme un guide doué de lumières supérieures. Un tel gouvernement dirige l’opinion, règle l’instruction publique, a une politique, une diplomatie et, dans une certaine mesure, une histoire, une philosophie. Un tel gouvernement ne se contente pas de tout