Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/32

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de remplacer : M. Étienne Quatremère. Mais ce devoir ayant été rempli ici même d’une manière qui ne me permet pas d’y revenir, je consacrerai cette première leçon à m’entretenir avec vous du caractère général des peuples dont nous étudierons ensemble la langue et les littératures, du rôle qu’ils ont joué dans l’histoire, de la part qu’ils ont fournie à l’œuvre commune de la civilisation.


Le résultat le plus important auquel les sciences historiques et philologiques sont arrivées depuis un demi-siècle, a été de montrer dans le développement général de l’humanité deux éléments en quelque sorte, qui, se mêlant dans des proportions inégales, ont fait la trame du tissu de l’histoire. Dès le xviie siècle et presque dès le moyen âge, on avait reconnu que les Hébreux, les Phéniciens, les Carthaginois, les Syriens, Babylone, au moins depuis une certaine époque, les Arabes, les Abyssins, avaient parlé des langues tout à fait congénères. Eichhorn, au siècle dernier, proposa d’appeler ces langues sémitiques, et ce nom, tout inexact qu’il est, peut continuer d’être employé. Dans les premières années de notre siècle, on fit une découverte autrement importante et délicate. Grâce à la connaissance du sanscrit, due aux savants anglais de Calcutta, les philologues de l’Allemagne, en particulier M. Bopp, posèrent des principes sûrs au moyen desquels on démontra que les anciens idiomes de l’Inde brahmanique, les différents dialectes de la Perse, l’arménien, plusieurs dialectes du Caucase, les langues grecque et latine, avec leurs dérivés, les langues slaves, germaniques et celtiques, forment