Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/33

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un vaste ensemble, profondément distinct du groupe sémitique, et qu’on appela indo-germanique ou indo-européen.

La ligne de démarcation révélée par l’étude comparée des langues, ne tarda pas à être fortifiée par l’étude des littératures, des institutions, des mœurs, des religions. Quand on sait se placer au point de vue d’une comparaison délicate, on reconnaît dans les littératures antiques de l’Inde, de la Grèce, de la Perse, des peuples germaniques, des genres communs tenant à une profonde similitude d’esprit. La littérature des Hébreux et celle des Arabes ont aussi entre elles beaucoup de rapport ; au contraire, elles en ont aussi peu que possible avec celles que j’énumérais tout à l’heure. On chercherait vainement une épopée ou une tragédie chez les peuples sémitiques ; on chercherait vainement chez les peuples indo-européens l’analogue de la kasida des Arabes et ce genre d’éloquence qui distingue les prophètes juifs et le Coran. — Il en faut dire autant des institutions. Les peuples indo-européens eurent, à l’origine, un vieux droit, dont les lambeaux se retrouvent dans les Brahmanas de l’Inde, dans les formules des Latins, dans les coutumes celtiques, slaves et germaniques ; la vie patriarchale des Hébreux et des Arabes fut soumise, sans contredit, à des lois toutes différentes. — Enfin, la comparaison des religions est venue jeter sur cette question des lumières décisives. À côté de la philologie comparée s’est fondée en Allemagne, il y a quelques années, une mythologie comparée, laquelle a démontré que tous les peuples indo-européens eurent à l’origine, avec une même langue, une même religion, dont chacun a emporté, en se séparant