Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/67

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la demeure du mort pour l’éternité. On venait l’y voir à certains jours. Il est là au milieu des siens, de sa femme, de ses enfants, de ses domestiques, de ses scribes, de ses chiens, de ses singes verts, représentés en petite imagerie sur les parois de chaque chambre. Le portrait du défunt, en bas-relief, se trouve à la place d’honneur ; d’ordinaire il est répété plusieurs fois. Une grande stèle donne ses titres et quelquefois sa biographie. S’il y avait dans la maison un personnage offrant un trait caractéristique, une infirmité par exemple, on le représente, pour que les souvenirs du mort ne soient pas dérangés. Tous les détails de la vie du temps se voient à l’entour : cette vie est presque uniquement agricole ; elle se passe dans des fermes ou édifices légers portés sur des colonnettes élégantes. Le nombre des animaux domestiques que possédait le défunt (bœufs, ânes, chiens, singes, antilopes, gazelles, oies, demoiselles de Numidie, canards, cigognes domestiques, tourterelles) est soigneusement écrit sur le mur[1]. À ces détails domestiques se mêlent tous les souvenirs de la carrière du mort, de ses voyages, de son commerce. Jeux, danses, luttes, joutes sur des barques, chanteurs, danseuses aux cheveux tressés et ornés de plaques d’or, rien n’y manque. Tout cela est d’un réalisme absolu, d’une jolie petite sculpture peinte très-fine, visant surtout à être expressive ; des légendes hiéroglyphiques expliquent surabondamment ce que les images auraient d’obscur. Jamais une trace de vie militaire avant la douzième dynastie, assez peu de religion, aucune trace

  1. On ne voit figurer ni chevaux, ni chameaux, ni girafes, ni éléphants, ni moutons, ni chats, ni poules.