Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/266

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particulier, devrait, sur certains points, s’inspirer de cet esprit.

Le supérieur de la maison d’Issy, quand j’y passai, était M. Gosselin. C’est l’homme le plus poli et le plus aimable que j’aie jamais connu. Sa famille appartenait à cette partie de l’ancienne bourgeoisie qui, sans être affiliée aux jansénistes, partageait l’attachement extrême de ces derniers pour la religion. Sa mère, à laquelle il paraît qu’il ressemblait beaucoup, vivait encore, et il l’entourait de respects touchants. Il aimait à rappeler les premières leçons de politesse qu’elle lui donnait vers 1799. Dans son enfance, il s’était habitué, selon un usage auquel il était dangereux de se soustraire, à dire « citoyen ». Dès les premiers jours où l’on célébra la messe catholique, après la Révolution, sa mère l’y mena. Ils se trouvèrent presque seuls avec le prêtre. « Va offrir à monsieur de lui servir la messe, » lui dit Madame Gosselin. L’enfant s’approcha et balbutia en rougissant : « Citoyen, voulez-vous me permettre de vous servir la messe ? ― Chut ! reprit sa mère ;