Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/277

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plane, simple, droite, et tout bonnement chrétienne de M. Gosselin. Cette division perçait très peu chez les maîtres. Cependant le sage M. Gosselin, opposé à tous les excès, en suspicion contre les singularités et les nouveautés, fronçait le sourcil devant certaines bizarreries. Dans les récréations, il affectait une conversation gaie et presque profane, en opposition avec les entretiens toujours sublimes de M. Pinault. Il avait peu d’égards pour le bonhomme Hanique et n’aimait pas qu’on parlât de lui avec admiration. Peut-être trouvait-il, au point de vue de la correction hiérarchique, plus d’un inconvénient à ce qu’un concierge fût un trop grand docteur. Quelques livres qui étaient la lecture favorite des mystiques, tels que ceux de Marie d’Agreda, il les condamnait hautement et les interdisait.

Le cours de M. Pinault était la chose du monde la plus singulière. Il ne dissimulait pas son mépris pour les sciences qu’il enseignait et pour l’esprit humain en général. Quelquefois il s’endormait presque en faisant sa classe. Il détournait tout à fait ses adeptes de l’étude.