Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/135

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quelque chose de très-analogue à ce qui se passa sous Néron, deux cent trente ans plus tard. La rage et le désespoir jetèrent les croyants dans le monde des visions et des rêves. La première apocalypse, le « livre de Daniel », parut. Ce fut comme une renaissance du prophétisme, mais sous une forme très-différente de l’ancienne et avec une vue bien plus large des destinées du monde. Le livre de Daniel donna en quelque sorte aux espérances messianiques leur dernière expression. Le Messie ne fut plus un roi à la façon de David et de Salomon, un Cyrus théocrate et mosaïste ; ce fut un « fils de l’homme » apparaissant dans la nue[1], un être surnaturel, revêtu de l’apparence humaine, chargé de juger le monde et de présider à l’âge d’or. Peut-être le Sosiosch de la Perse, le grand prophète à venir, chargé de préparer le règne d’Ormuzd, fournit-il quelques traits à ce nouvel idéal[2]. L’auteur inconnu du livre de Daniel eut, en tout cas, une influence décisive sur l’événement religieux qui allait transformer le monde. Il créa la mise en scène

  1. Dan., vii, 13 et suiv.
  2. Vendidad, xix, 18. 19 ; Minokhired, passage publié dans la Zeitschrift der deutschen morgenländischen Gesellschaft, I, 263 ; Boundehesch, xxxi. Le manque de chronologie certaine pour les textes zends et pehlvis laisse planer beaucoup de doute sur ces rapprochements entre les croyances juives et persanes.