Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/517

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primitive, le souper du jeudi fut la vraie Pâque, le sceau de l’alliance nouvelle. Chaque disciple y rapporta ses plus chers souvenirs, et une foule de traits touchants que chacun gardait du maître furent accumulés sur ce repas, qui devint la pierre angulaire de la piété chrétienne et le point de départ des plus fécondes institutions.

Nul doute, en effet, que l’amour tendre dont le cœur de Jésus était rempli pour la petite Église qui l’entourait n’ait débordé à ce moment[1]. Son âme calme et forte se trouvait légère sous le poids des sombres préoccupations qui l’assiégeaient. Il eut un mot pour chacun de ses amis. Deux d’entre eux, Jean et Pierre, surtout, furent l’objet de tendres marques d’attachement. Jean était couché sur le divan, à côté de Jésus, et sa tête reposait sur la poitrine du

    doctrine qui semble en contradiction avec le système du quatrième Évangile font justement appel à l’autorité de l’apôtre Jean et de ses disciples pour appuyer une doctrine qui parait conforme au récit des synoptiques (Polycrate, dans Eusèbe, Hist. eccl., V, 24. Comp. Chron. pasc., p. 6 et suiv., édit. Du Cange). Mais cette affaire est très-obscure. Jean et ses disciples pouvaient célébrer la Pâque, comme toute l’école apostolique primitive, le 14 de nisan, non parce qu’ils croyaient que Jésus avait mangé l’agneau ce jour-là, mais parce qu’ils croyaient que Jésus, le vrai agneau pascal (remarquez Jean, i, 29 ; xix, 36, en comparant Apoc., v, 6, etc.), était mort ce jour-là.

  1. Jean, xiii, 1 et suiv.