Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/644

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champs, supposent ainsi que le crucifiement eut lieu avant le commencement de la période sacrée. Enfin on ne concevrait pas que les Juifs eussent provoqué une exécution, ni même que les Romains l’eussent faite, en un jour si solennel[1].

§ 34. J’abandonne les entretiens de Pilate et de Jésus, composés évidemment par conjecture, mais avec un sentiment assez exact de la situation des deux personnes. La question du v. 9 a encore son écho dans Luc, et comme d’ordinaire ce trait insignifiant devient chez le troisième évangéliste toute une légende[2]. La topographie et l’hébreu du v. 13 sont de bon aloi. Toute cette scène est d’une grande justesse historique, bien que les paroles prêtées aux personnages soient de la façon du narrateur. Ce qui concerne Barabbas, au contraire, est plus satisfaisant dans les synoptiques. Notre auteur se trompe sans doute en faisant de cet homme un voleur. Les synoptiques sont bien plus dans la vraisemblance, en le présentant comme un personnage aimé du peuple et arrêté pour cause d’émeute. En ce qui concerne la flagellation, Marc et Matthieu ont aussi une petite nuance de plus. On voit mieux dans leur récit que la flagellation fut un simple préliminaire du crucifiement, selon le droit commun. L’auteur du quatrième Évangile ne semble pas se douter que la flagellation supposait déjà une condamnation irrévocable. Cette fois encore, il marche tout à fait d’accord avec Luc (xxiii, 16) ; comme ce dernier, il cherche, en tout ce qui concerne Pilate, à excuser l’autorité romaine et à charger les Juifs.

§ 35. Le trait minutieux de la tunique sans couture four-

  1. Mischna, Sanhédrin, iv, 1. Comp. Philon, In Flacc., § 10.
  2. Luc, xxiii, 6 et suiv.