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Page:Renard - Comedies.djvu/80

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MARTHE

Notre part est déjà très enviable.

PIERRE

Oh ! d’accord. Je ne me révolte pas, je ne souffre pas le martyre, ni vous non plus. Nos ménages ne sont pas des enfers. Ah ! si nous avions le moindre prétexte, le plus léger grief, nous ne sommes pas plus maladroits que d’autres. Nous nous acquitterions d’un banal adultère, comme tout le monde. C’est bien difficile de tromper un mari ou une femme qui le méritent !

MARTHE

Et ils en sont indignes !

PIERRE

Ah ! s’ils le méritaient !… je vous promets que ce ne serait pas long. Le droit, le devoir d’un homme qui n’aime plus une femme, c’est de courir en aimer une autre, immédiatement, afin que sur ce triste monde où elle est si rare, il ne se perde pas une parcelle de joie.

MARTHE

Et ils ne veulent pas nous mettre dans la nécessité d’obéir à ce devoir. Rien à faire. Les misérables !

PIERRE

Je vous donne ma parole que quelquefois j’ai de fichus moments. Je rage tout seul. Pour me calmer j’ouvre un livre de vers. Je me crie des vers à tue-