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LES DRAMES DE LA CONSCIENCE


ce qu’elle en laisse. Elle affecte de plus en plus de s’adresser à Dieu sans se servir d’un personnage de transmission. Volontiers, pour paraître tout à fait sincère, elle n’irait plus à l’église. " Est-ce que je m’occupe du curé ! " dit-elle à chaque instant. Cette nuance de dédain ne froisse pas le curé. Il s’en accommode : il faut bien — pour vivre.

Et d’ailleurs, il lui reste les bigotes.

La bigote, au contraire, ne voit dans la religion que le curé. Le peu qu’elle croit, elle le croit bassement et petitement. Elle ne s’occupe que du curé, qui au fond ne tient qu’à elle, sachant bien que c’est son unique, dernière et durable force. Son troupeau en est composé, un peu mélangé, car aucune messe n’empêche une bigote de mentir, de bavarder, de calomnier, ou d’être insupportable, et jamais une bigote n’est sortie de l’église avec un peu plus de bonté et d’indulgence. Le curé n’y regarde pas de si près. Il se glorifie de régner sur des apparences de foi. Il ne recherche pas la qualité, mais le nombre. Il prend et garde toutes les bigotes, avec la complicité des maris.

A quoi pensent les maris !

M. Briand nous a offert la séparation, et tout le monde se plaint de cette loi, même les curés ;