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Page:Renard - L’Œil Clair, 1913.djvu/75

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PRIX A L’ÉCOLE COMMUNALE

La première condition, pour qu’un prix fasse plaisir, c’est, naturellement, qu’on l'ait gagné sur des concurrents sérieux.

Une petite nièce à moi m’écrivait qu’elle venait d’avoir huit premiers prix. J’étais tout fier, et je l’ai félicitée par une longue lettre débordante, puis j’ai eu la curiosité de savoir combien il y avait d’élèves dans la classe de ma petite nièce.

Elles étaient deux, et l’une des deux concurrentes, pas ma petite nièce, l’autre, avait été absente six mois de l’année, pour cause de maladie.

Quelle bizarre aventure ! Par dignité, je n’ai pas repris mes félicitations, mais ma petite nièce ne m’y repincera plus.

Peut-on, afin qu’il n’y ait pas de jaloux, donner des prix à tout le monde ?

C’est grave ! Le peut-on ? Oui. On ne le devrait pas, mais, tout pesé, ce n’est pas un grosse injustice.

Quelques prix de plus ne ruinent point une municipalité. Les élèves qui méritent leurs prix éprouvent une joie sans mélange ; les autres sont heureux aussi, mais avec une nuance ; ils sentent, tout au fond du cœur, un léger remords salutaire, vite étouffé par la résolution de mieux travailler l’année prochaine.