Aller au contenu

Page:Renard - La Lanterne sourde, Coquecigrues,1906.djvu/110

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Eugénie. — Je te promets de te quitter tout de suite, de te laisser à tes nombreux travaux, si tu me montres au moins le chapeau ou la canne de ce monsieur. Ça me tranquilliserait.

Émile. — C’est de l’enfantillage. Qui m’empêchera de te montrer mon chapeau à moi ou ma canne à moi ? D’abord les vieux ont des parapluies.

Eugénie. — Ah ! tu ruses. Tu te dérobes. Alors j’entrerai.

Émile. — Chère madame, vous n’entrerez pas.

Eugénie. — Brutal ! vous me faites mal aux poignets.

Émile. — Naturellement. Criez, ameutez les gens ! Bousculez toutes mes quilles. Je vais être dans la nécessité de vous fermer la porte au nez.

Eugénie. — Quel accueil ! Mon ami, mon cher ami !

Émile. — Eh ben, quoi ?

Eugénie. — Adieu.

Émile. — Non, pas adieu. Ce serait trop bête. Nous nous aimons, après tout, et il est inutile de nous chagriner. Pardonnez-moi. J’ai été un peu brusque. Mais aussi, comprenez donc que mon monsieur s’exaspère. Je suis sûr qu’il marche de long en large. Donnez votre poignet que je souffle dessus. Ne craignez rien, je vous reverrai. Quand retournez-vous en province ?

Eugénie. — Dame ! ce soir. Je n’étais venue que pour toi.

Émile. — Retardez votre départ. Vous avez le temps. Il y a des monuments à Paris. Je vous guiderai. Fixons un rendez-vous pour demain. À quelle heure ? à quel endroit ?

Eugénie. — Choisis toi-même.