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Page:Renard - La Lanterne sourde, Coquecigrues,1906.djvu/130

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de tête dans le vide. Ses pattes, gênées par la corde de la nasse, par les herbes, battaient l’eau, blanche d’écume. Bientôt il n’en pourrait plus. La « bonne bête » mourrait victime du devoir.

— Fichu, mon chien ! pensa M. Mignan déjà bouleversé.

Il lui adressa des prières, des injures, lui dit qu’il n’avait jamais vu un chien aussi stupide.

— Et c’est ma faute ! me voilà propre : je noie mon chien, afin de le baigner, moi !

Espérant lui faire lâcher sa proie fatale pour une autre, il jeta des morceaux de bois à droite et à gauche.

Encore ! soit : tout à l’heure. Levraut les rapporterait, après, quand il aurait déposé celui-ci d’abord aux pieds de son maître. Et « l’intelligent animal » hurlait d’impuissance.

Comment le sauver ! Une mauvaise barque se trouvait là, couchée sur le flanc, mais amarrée, cadenassée, sans rames, à moitié pleine d’eau croupie, inutile, exaspérante.

— Veux-tu lâcher ça, oui ou non ?

Levraut répondit par une sorte de râle et roula des yeux qui implorent. Il enfonçait.

M. Mignan se raidit, arracha la barque, la mit à flot, d’un pied entra dedans, et de l’autre se poussa du côté du chien. Il avait si adroitement manœuvré qu’il put lui appliquer, au passage, deux fortes claques sur le museau.

Ainsi corrigé, Levraut enfin ouvrit la gueule d’où tomba le flotteur de nasse, et se sauva seul au bord.

Cependant, la barque s’arrêta, son élan mort, et