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le maître de la lumière

tres ajoutèrent foi aux dires du chef qui, les trompant, assura son monde que ces terres avaient été signalées par d’obscurs navigateurs.

Si l’on apprend qu’à bord du yacht personne ne se doutait des desseins de César, compère matois comme tout bon corsaire, on s’expliquera sans difficulté que le mystère se soit perpétué.

À la suite de ces diverses péripéties, le yacht, rentré à Bordeaux, y fut vendu, et César, désappointé, soucieux des sommes dépensées, mal en cour et peu sociable, se retira tout de bon à Silaz, avec ses singes, ses perroquets et ses oiseaux exotiques, dont il avait une pleine volière toute résonnante de gazouillis et de ramages. On était en 1816.

Il y avait bien une sorte d’avarice dans le soin qu’il prenait de cacher l’existence du verre optique, une espèce de jouissance égoïste. Cependant, il faut reconnaître que, s’il voulait se réserver la faculté d’utiliser la matière dans son propre intérêt, il était assez à propos d’en garder le secret. Or, un témoin aussi fidèle, aussi muet et aussi insoupçonnable que le verre optique pouvait lui être d’un grand secours dans bien des cas, notamment le cas où il aurait jugé bon de prendre part à quelqu’un de ces complots dont les partisans de l’empereur exilé et du duc de Reichstadt ne manquaient pas de l’entretenir.

Attendait-il son heure pour s’y mêler ? Rien ne l’indique ; ce qui ne l’empêcha pas de passer, aux yeux des Bourbons, pour un bonapartiste enragé et dangereux.

La fin du manuscrit rapporte quelques expériences peu intéressantes qu’il fit sur le verre optique durant les années de Silaz, des considérations sans portée au sujet d’une idée qu’il abandonna : de confier à des chimistes un échantillon de la matière, pour qu’ils tentassent de l’analyser puis de la reproduire. Enfin, il explique pourquoi, avant de s’en aller à Paris, il eut la pensée de remplacer deux vitres de la petite chambre haute par deux plaques de verre optique vierge.

C’était tout bonnement pour laisser là un observateur invisible. Quand il reviendrait à Silaz, il n’aurait qu’à déclouer les plaques, à les feuilleter ; ainsi tout ce qui se