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Et Charles Christiani se livrait sur eux à des investigations méticuleuses.

C’étaient des plaques relativement pesantes et fort épaisses. Quand on les examinait par la tranche, cette tranche apparaissait composée d’une infinité de raies très minces dont les unes étaient noires, d’autres lumineuses et d’autres plus ou moins claires ou obscures. Il palpa cette tranche, cette coupe ; elle lui sembla de contexture feuilletée.

Les plaques avaient été fixées dans le châssis de la croisée à l’aide de pointes et de mastic, comme des vitres ordinales, mais beaucoup trop épaisses.

Ce qui souleva d’émerveillement celui qui les étudiait, ce fut qu’elles se comportaient exactement comme les vitres d’une fenêtre et pas du tout comme un écran à projection ou bien le verre dépoli d’une chambre noire.

Nous nous expliquons immédiatement.

S’il s’agit d’un écran ou d’un fond de chambre noire, vous avez beau changer de place par rapport à ces plans, c’est toujours la même image qui vous apparaîtra. Baissez-vous, élevez-vous, écartez-vous sur les côtés, vous n’en découvrirez pas, pour cela, un pouce d’image supplémentaire.

Au rebours, Charles, déjà tout ébahi d’avoir dans sa chambre à coucher ces vues vivantes attachées à un autre lieu, s’aperçut que, suivant sa position, il en faisait varier le champ et la perspective, de même que, lorsqu’on regarde par une fenêtre, soit de gauche, soit de droite, soit en plongeant, soit d’en bas, soit de face, soit de près, soit de loin, le paysage, au gré de ces mouvements, se cache par-ci, se découvre par-là, modifie les rapports de ses lignes, se développe ou se réduit.

Charles essaya de se rappeler quel aspect présentait naguère la substance secrète lorsqu’elle était encore opaque et qu’il l’avait aperçue en venant travailler dans la petite chambre haute. Il crut ne pas se tromper en évoquant une surface mate, analogue à une ardoise polie, ou bien a du bois dur et noir, ou noirci ; c’était d’ailleurs l’idée d’un bois de poirier ou d’ébène qui s’attardait en lui avec le plus de ténacité. Mais mainte-