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délibération

conseil de famille, à peine réduit et simplifié dans la mesure convenable.

J’aperçois encore, autour de la grande table, nos visages de tristesse et de lassitude. La canne brisée de mon neveu était là, au milieu du cercle, comme une pièce à conviction dans un prétoire. Ma belle-sœur n’en pouvait détacher son regard… On découvrait aussi sur la table, devant Mme Arquedouve, le schéma que j’avais relevé des empreintes et dont Maxime avait pointillé chaque trait au moyen d’une aiguille, afin de rendre sensible aux doigts de sa grand’mère aveugle l’effigie de la chose étonnante et terrible.

DÉLIBÉRATION DU 7 MAI, À 6 HEURES DU SOIR[1]

Moi. — À présent que nous connaissons tout ce qu’on peut connaître en fait de vestiges matériels et de témoignages concrets, il faut raisonner et tâcher de découvrir quelque chose qui oriente nos recherches… Un point de direction… Car il faut agir, enfin ! Je propose que chacun donne son avis à la ronde.

Garan, avec un regard à la dérobée sur Maxime et Robert. — Je ne vous cacherai pas que ma conviction est presque faite. Cependant, je ne suis pas infaillible ; et, dans tous les cas, un peu de discussion ne fera pas de mal. Mais, avant de se demander où, qui et comment, il faudrait savoir pourquoi.

Tiburce, se rongeant les ongles. — Parfaitement. Pourquoi X. a-t-il enlevé Mlle Le Tellier, M. et Mme Henri Monbardeau ?

Moi. — Encore « enlevé » ! Toujours « enlevé » ! Rien ne prouve qu’ils aient été « enlevés » ! Ne mettons pas la charrue avant les bœufs !

Garan. — D’accord. La première question est en effet celle-ci : L’un des trois disparus avait-il une raison de disparaître volontairement ?

Calixte. — Mais nous nous égarons, voyons ! Ce qui s’est

  1. Si le lecteur pouvait confronter le manuscrit du commentaire avec celui du compte rendu proprement dit, jamais il ne croirait qu’une même personne les a tracés tous deux ; tant l’écriture est différente.