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Page:Renard - Le carnaval du mystère, 1929.djvu/113

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le fils

Ah ! mourir, n’est-ce pas ? Que feraient-ils sur terre, à présent ? Assez souffert ! Voilà : mourir, c’est ce qu’il faut. Voilà : ne plus penser, dormir, s’en aller tous les deux… Le retrouver peut-être ?…

Pourtant, pas un mot n’est prononcé. Et soudain…

Qu’est-il arrivé ? Pourquoi se redresse-t-il ? Pourquoi se relève-t-elle ? Pourquoi, au lieu de proposer le dénouement lugubre, a-t-elle dit, au contraire :

— Allons, mon Jules !… Du cœur ! Il s’agit de vivre… — Il est temps de te rapproprier pour aller à ta maison… — Enlève ta veste, j’y coudrai un crêpe… — Ta cravate noire est dans la commode.

Et pourquoi n’a-t-il répondu qu’en regardant sa médaille ?

Questionnés, ils soutiendraient qu’ils n’ont rien entendu. Le réveil qui sonne au loin, dans la caserne, s’est si bien mêlé aux voix innombrables de l’heure, qu’ils ne l’ont pas distingué sous leur accablement. Mais, sans le savoir, ils l’ont entendu comme toutes ces cadences qui rythment nos allures, nos gestes et nos chants, à notre insu, — comme tous ces métronomes insoupçonnés qui nous plient à leur mesure, — comme le tic tac de l’horloge.

L’alerte fanfare, brève et nue, a pénétré subrepticement au plus profond de leur âme.