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le carnaval du mystère

besogne, dont rien ne le distrayait. Je profitai du bruit d’une lourde voiture pour m’approcher de lui par derrière, à pas de loup…

Oh ! Toute ma vie, je me rappellerai la vision déchirante : mon grand, mon cher Arnoldson, couché sur un cahier de classe et, d’une écriture hâtive et fantasque, alignant des mots sans suite, des mots d’enfant !

Quelle flèche invisible me transperça ? Une chaude et irrésistible montée noya mes pau­pières, et je me retirai silencieusement, la mort dans le cœur.

Nora m’attendait, immobile, appuyée à la muraille. Nous nous regardâmes. Mais l’obscur soleil de minuit baignait pour moi sa face dou­loureuse ; je ne voyais ses larmes qu’à travers les miennes.