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Page:Renard - Le carnaval du mystère, 1929.djvu/68

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le carnaval du mystère

— En vérité, minauda M. Bourdure, je ne sais si je dois…

— Prenez donc ! fit l’autre en lui poussant le cigare dans la main.

M. Bourdure rentra son porte-cigarettes usagé, et se mit à fumer le havane. Mais ses compagnons de voyage manifestèrent, par leur attitude, l’intention bien arrêtée de ne pas causer davantage avec le nouveau venu ; et M. Bourdure dut se contenter de les examiner à la dérobée, au sein du nuage bleu qui remplissait le compartiment.

Bien qu’il ne fût qu’un modeste rédacteur au ministère du Travail, le vieux M. Bourdure se plaisait à la contemplation de l’humanité. Il en observait volontiers les types. Ainsi remarqua-t-il que, de ces trois personnages, l’un arborait une physionomie très franche, voire candide. Les deux autres — dont l’homme au cigare — lui semblèrent des quidams moins sympathiques, cauteleux, vantards, qui, s’entretenant tout bas avec le premier, lui marquaient une déférence servile, dont M. Bourdure songea qu’il se méfierait, lui, à la place de ce bon monsieur au regard si honnête.

Mais M. Bourdure n’eut pas le temps de poursuivre son étude. Parti de Paris le matin même, il avait beaucoup travaillé, chez le notaire de La Ferté-Milon, à débrouiller une question d’héritage. Il se sentait las, somnolent. Au surplus, la fumée du havane lui montait au cerveau. La