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le témoin

chaleur du wagon, l’atmosphère étouffante de cette tabagie l’accablaient. M. Bourdure ne tarda pas à s’endormir d’un sommeil pesant.

La nuit venait. Décembre. Cinq heures du soir, environ.

Or, M. Bourdure, s’éveillant en sursaut, vit un spectacle qui le glaça d’horreur.

La portière était ouverte sur les ténèbres. Le bon monsieur, livide et la tête ballante, gisait sur le plancher. Et les deux autres s’occupaient activement à le jeter dehors.

L’infortuné M. Bourdure, incapable de faire un geste ni d’articuler une syllabe, assista, impuissant, au dernier acte du crime qui venait d’être commis. Quand les meurtriers se retournèrent, leur besogne sinistre étant faite, ils aperçurent le petit rédacteur immobile dans son coin, plus pâle que le cadavre même de leur victime, et qui les règardait avec des yeux extasiés par l’épouvante.

— Nom de Dieu ! jura l’homme au cigare.

M. Bourdure comprenait vaguement qu’il avait gêné les malandrins ; que son intrusion avait failli sauver la vie à leur malheureuse dupe. Le havane, parbleu, était un narcotique ! On avait espéré que M. Bourdure, anesthésié, ne se réveillerait qu’en gare de Paris, secoué