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POÉSIES INÉDITES.



Ils s’éveillent : l’hiver aurait-il fait semblant

De partir ? Aujourd’hui comme hier, tout est blanc.

Le merle raisonneur devine quelque piège :

" Ces blancheurs, c’est peut-être encore de la neige ! "


Après la vendange


Avec sa feuille morte, où se glace la rouille,

La vigne semble triste ainsi qu’une dépouille

Une dernière fois étendue au soleil.

Hier, qui donc a pris tout son raisin vermeil ?

Les oiseaux, en émoi, modulent leur surprise.

Car la vigne mûrit pour que l’oiseau se grise.

Sournoisement qui donc a vendangé sans eux ?

Et, sans en avoir l’air, les merles soupçonneux,

Sous les feuilles qui font un bruit de voix plaintives,

Regardent de travers l’attitude des grives.


Les ruisseaux


Au bassin où s’endort la marche de ses eaux,

La rivière calmée écoute les ruisseaux :

L’un, coureur, a beaucoup appris sur son passage,

Les vieux arbres du mont l’ont chargé de feuillage ;

L’autre apporte avec lui le murmure câlin

Des joncs, et le plain-chant des canards du moulin.

Son mince filet clair, et pur de toute boue,

S’est écrémé longtemps sous les dents de la roue ;

Et l’autre tremble encor, pris d’un accès de toux,

Tout essoufflé d’avoir tant sauté de cailloux.