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Page:Renard Oeuvres completes 1 Bernouard.djvu/180

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— On pourrait s’arranger, dit la Rollet.

Et cette idée inattendue, qu’elles n’auraient qu’à demander pour avoir un autre homme nouveau, tout neuf, partout, dans leur lit, sur leur dos, les agita d’un rire inextinguible, qu’elles savouraient en larmes. Elles revenaient sans cesse à ce sujet et, quand elles l’eurent épuisé, la conversation languit.

Il y eut une pause, coupée de petits hoquets intermittents, quand l’une d’elles trouvait plus drôle cette idée usée qui achevait de se dérouler en son esprit comme l’écho continue la voix. Puis, rien.

La bougie pâle les éclairait faiblement, posant ça et là un reflet capricieux sur le poli des meubles ou le brillant des carreaux rouges.

Les deux femmes courbaient la tête presque entre leurs genoux, absorbées.

La Rollet dit tout à coup :

— Vous vous ennuyez, pas vrai ?

La Collard protesta ; mais, comme elle regardait à chaque instant du côté de la porte, se levant à demi quand elle entendait un bruit de pas, le cabas au bras, toute prête à partir, la Rollet insista :

— Si, j’vois ben que vous vous ennuyez.

La Collard ne se défendit plus et répondit naïvement :

— C’est toujours comme ça quand je suis chez les autres.

— C’est bien naturel, dit la Rollet. D’ailleurs elle bâillait aussi, et, malgré elle, tournait ses paupières lourdes vers l’énorme lit qui faisait dans un coin une masse d’un vert sombre, si haut qu’il fallait en y montant se plier en deux pour ne pas se cogner la tête aux solives enfumées. Elle dit tout à coup :