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Page:Renard Oeuvres completes 1 Bernouard.djvu/355

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JULES RENARD


sait des " oh ! " d’étonnement, et n’en revenait pas, à la fois dépitée et orgueilleuse. Quand Pierre eut fini de raconter ses petites affaires, Leroc, oubliant son bras malade, s’assit sur son lit :

— Comment ! c’était une farce ! Tu te moques comme ça de tes père et mère, et, par-dessus le marché, tu manques de les tuer !

Il avait saisi une chaise avec sa main libre et la lança de toute sa force. Pierre l’attrapa au vol et la posa tranquillement sur ses quatre pieds. Leroc voulait sauter par terre. La Griotte le prévint à temps.

— Allons bon ! ça va recommencer ! Tu fais la bête, à la fin !

Pierre dut l’aider à le maintenir. Il pressa légèrement le bras blessé de son père qui, dompté comme un taureau auquel on a mis un anneau dans le nez, se recoucha avec un grognement perçant et continu, tandis que Pierre, sans le lâcher,, sanglotait et lui disait, en maîtrisant ses soubresauts, le corps tout secoué :

— Voyons, papa ! Si je te dis que je cours les filles, tu te fâches, et, si je te dis que je cours pas les filles, tu te fâches encore. Alors je ne sais plus quoi dire, moi !