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la plainte de la sirène

Et maintenant le chef se tait. Et le pilote
Laisse aller le navire. Au gré de l’onde, il flotte
      Entre les pointes de rocher.
Et le chant continue. En dehors on se penche.
On se sent une soif d’oubli que rien n’étanche.
      On voudrait dans l’eau se coucher.

De plus en plus le chant devient rêveur et tendre ;
De plus en plus chacun, afin de mieux l’entendre,
      Se penche vers l’eau de velours.
Irrésistiblement elle luit et frissonne.
Le navire déjà n’est qu’un désert. Personne !
      Tous ont disparu pour toujours.