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Page:Renee-dunan-entre-deux-caresses-1927.djvu/175

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ENTRE DEUX CARESSES

tation est plus rare et où règnent certains moustiques empoisonnés, là enfin où sont les placers d’or, il faudrait redescendre, avec le soleil, devant soi le matin, derrière soi le soir. Alors on trouverait le Maroni.

De l’autre côté du large fleuve c’est la terre où les surveillants du bagne ne vont plus : La Guyane hollandaise.

Mais il fallait trouver le Maroni…

Rien ne troubla jusqu’à cinq heures la fuite des deux forçats. Ils allaient d’un pas irrégulier, Mexme coupait le moins possible des obstacles végétaux afin de ne pas laisser de trace. Le sol était fangeux et surchargé de branches pourries, de feuilles molles et d’herbes rampantes dont l’écrasement dégageait une odeur vireuse.

Parfois le rocher affleurait et le choc des sabots s’entendait sous les arbres clairsemés. On marchait plus vite alors. Ensuite on retombait dans le vaste conglomérat des chlorophylles. On eut cru l’avancée impossible, tant tout se tassait devant ces deux hommes hâtifs. Mais ils trouvaient enfin leur route, et tout se fermait derrière leurs pas muets.

La forêt offrait partout son mystère cruel. Peu d’animaux, sinon infimes et fuyards. Presque tous pourtant avaient des couleurs inattendues, tendres et semblables à de délicats tons d’aquarelles.

L’aspect de vie désordonnée et apocalyptique, l’étrangeté de spectacles sans recul, la violence