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Page:Renee-dunan-entre-deux-caresses-1927.djvu/230

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ENTRE DEUX CARESSES

mettait leurs fortunes. Et ils le faisaient partir pour Sainte-Hélène. L’or transforme mêmes les âmes.

Tant d’hommes qu’on prétend estimer et dont les statues s’élèvent sur les places publiques furent seulement les valets de l’or. Ils lui prostituaient leur conscience et croyaient ne pas faire assez si, après leurs actes, l’or n’achetait pas en sus leur sincérité, rénovée depuis le temps qu’ils furent pauvres. Jeanne donnait moins à Mammon. Elle ne lui avait offert que son corps. Les sots disent ; la chair… Mais en vérité ce n’est que l’épiderme…

En son moi profond subsistait pour l’absent vaincu une affection indélébile. Épouse franche, loyale et généreuse, elle n’abandonnerait pas, tout écrasé qu’il fût par la société, celui qui restait son époux. Seule eut « accepté » quelqu’une de ces femmes vertueuses, promise à la prostitution onanique des chastetés. Jeanne n’acceptait pas. Elle tenait pour préjugés de faibles et d’hypocrites le respect des forts, la morale sociale, la pudeur et le labeur manuel. Ses devoirs étaient plus hauts. Ils justifiaient l’aristocratie de ses abandons physiques, et si besoin était, les crimes qu’il lui faudrait commettre.

Le soleil apparut. Les deux amants revenaient de banlieue. Dans un château, une scène de lubricité digne du Bas Empire avait occupé avec eux cinq couples dont la fortune représentait trois milliards.