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LA CULOTTE EN JERSEY DE SOIE

pas traverser toute la ville dans ce chemin catacombal.

Brusquement je me heurte à quelqu’un… Je n’ai généralement pas peur et l’ensemble de ce périple prouve que j’étais assez courageuse. Pourtant mon sang alors, comme disent les feuilletonistes, ne fit qu’un tour.

Étais-ce un homme ou une femme ? Aplatie, les bras écartés, le long du mur, je fis quelques pas en avant et, hors d’atteinte de la personne qui avait probablement aussi peur que moi, je me mis à courir. À dix mètres je devine le jour ou plutôt la sortie. Il me paraît, ô folie ! que je suis plus menacée de ce fait. Je cours plus vite, comme si on me poursuivait. Je sors d’un jet, haletante, et, en respirant d’une lampée l’air frais du dehors, je viens heurter trois soldats qui causaient paisiblement à la sortie même, dans une rue où pas une lumière ne se voit. Je bouscule les soldats, mais ne m’arrête pas. Je m’écarte aussitôt d’un bond. Seulement l’un des trois s’est élancé et me prend par le poignet.

Je tire et de l’autre main armée de ma serviette de lycée je frappe devant moi en disant d’une voix brève et saccadée :

— Lâchez-moi ! Lâchez-moi ! Mais lâchez-moi donc !…

Il ne lâche pas et les deux autres se précipitent. L’un me saisit par la taille. D’une secousse du corps, je l’écarte. Le dernier, plus habile, empoigne mon bras libre. Je les tire tous deux comme un bœuf attelé tire une charrue. Mais je ne lâche pas la serviette…

Celui que j’avais secoué revient et m’empoigne violemment par les hanches.

Je pousse un cri aigu

L’un des soldats dit :